La chaîne textile commence à la production ou à la récolte de la fibre brute. Les étapes de base au sein de cette chaîne sont présentées schématiquement dans le graphique ci-après et seront décrites dans cet article.
Fibres
Dans l’industrie textile, on utilise deux catégories de fibres : les naturelles et les chimiques. Les fibres chimiques regroupent à la fois les matières purement synthétiques d’origine pétrochimique et les matières cellulosiques régénérées fabriquées à partir de fibres de bois.
Une classification plus détaillée des fibres est la suivante :
Les fibres, dont traite cet article, sont décrites plus en détail ci-dessous, en mettant en particulier l’accent sur les impuretés types qu’elles contiennent. Une partie de ces impuretés va entrer dans le processus textile et influencer les émissions associées.
Fibres de polyester
Les fibres de polyester sont formées de macromolécules linéaires présentant dans la chaîne au moins 85 % d’un ester. Actuellement, trois polymères polyester sont commercialisés :
- le poly (éthylène téréphtalate) (PET) à base d’éthylène glycol,
- le poly (butylène téréphtalate) (PBT) à base de butylène glycol,
- et le polytriméthylène téréphtalate (PTT) à base de triméthylène glycol.
Toutefois, jusqu’à présent un seul de ces trois polymères, à savoir le poly (éthylène téréphtalate), également connu sous la désignation de PET, a été largement utilisé dans l’industrie textile. Par conséquent, dans les sections qui suivent, sauf indication contraire, le terme PES sera utilisé pour désigner les fibres de polyester standard à base de PET.
Les fibres de PET possèdent un degré de cristallinité très élevé, ce qui leur confère une excellente résistance à la chaleur et d’autres propriétés mécaniques. D’autre part, cette structure compacte empêche la diffusion des colorants à l’intérieur de la fibre pendant la teinture. Il en résulte que les fibres de PET ne peuvent être teintes à une température inférieure à 100°C, à moins d’utiliser des accélérateurs de teinture (appelés véhiculeurs). Les véhiculeurs sont nuisibles pour l’environnement et, dans de nombreux cas, toxiques pour l’homme. Leur utilisation est actuellement en baisse, mais elle a été de pratique courante pendant de nombreuses années.
Des fibres de polyester qui peuvent être teintes sans véhiculeurs sont actuellement disponibles sur le marché. Celles-ci comprennent les « fibres de polyester modifiées » ainsi que les fibres de PTT (voir liste ci-dessus). Les « fibres de polyester modifiées » sont à base de PET. Grâce aux modifications physiques et chimiques apportées à la structure de la fibre pendant le procédé de fabrication, elles présentent une cristallinité inférieure, ce qui les rend plus faciles à teindre sans véhiculeurs. Toutefois, en raison de leur coût élevé, l’application de ces fibres est limitée à des segments de marché spécifiques.
En ce qui concerne le PTT, c’est un polyester aromatique (polytriméthylène téréphtalate) qui est réalisé par polycondensation de 1,3-propanediol et d’acide téréphtalique. Le coût élevé de la synthèse du 1,3-propanediol a empêché, pendant de nombreuses années, la commercialisation de cette fibre. Récemment Shell s’est engagé dans une nouvelle voie de synthèse d’un coût moindre pour la production de ce monomère, ce qui s’est traduit par un regain d’intérêt pour les polymères PTT.
En ce qui concerne les fibres de polyester en général, il est également utile de mentionner que, pendant la réaction de polycondensation, des oligomères cycliques d’une très faible solubilité dans l’eau peuvent se former (1 à 3 % du poids de la fibre Ces oligomères ont tendance à migrer vers la surface de la fibre pendant la teinture, ce qui induit un effet négatif sur l’unisson et les solidités au frottement.
Fibres de polyamide
Le polymère de départ résulte de la réaction de polycondensation entre une diamine et un acide dicarboxylique. En fonction du nombre d’atomes de carbone dans le monomère, le produit final pourra être appelé polyamide 6.6 ou polyamide 6.
Le polyamide 6.6 est synthétisé par la polycondensation thermique de quantités équimoléculaires d’acide adipique et de 1,6-hexaméthylènediamine. Le condensat à l’état d’équilibre contient de faibles quantités de monomères et de dimères cycliques (2 %).
Le polyamide 6 est obtenu par polymérisation du monomère cyclique ε-caprolactame. La teneur en caprolactame dans le polymère peut être réduite à 0,2 % par l’extraction à l’eau chaude. La teneur en caprolactame augmente au cours de l’extrusion (filage par fusion) et une partie de celui-ci se dissipe partiellement au cours des traitements thermiques ultérieurs.
Fibres acryliques
Le polymère est obtenu par polymérisation radicalaire de l’acrylonitrile dans une émulsion aqueuse ou dans un solvant. Le polymère formé, constitué à 100 % d’acrylonitrile (également appelé PAN) donne des fibres possédant une affinité tinctoriale insuffisante, étant donnée la température de transition vitreuse trop élevée (supérieure à 100°C). Pour cette raison, ce polymère n’est plus utilisé dans l’industrie textile. Les fibres acryliques communément disponibles sur le marché à l’heure actuelle, sont des copolymères anioniques qui contiennent 85 à 89 % d’acrylonitrile, 4 à 10 % de comonomères non ioniques (chlorure de vinyle, acétate de vinyle, acrylate de méthyle) et 0,5 à 1 % de comonomères ioniques qui contiennent des groupes sulfonés ou sulfatés.
La fibre peut être produite par filature à sec ou au mouillé. Dans le cas de la technique de filature à sec, le polymère est dissout dans le diméthylformamide (DMF). Pour la technique de filature au mouillé, en plus du DMF, on utilise du diméthylacétamide, du diméthylsulfoxide, du carbonate d’éthyle et des solutions aqueuses de sels ou d’acides inorganiques. On retrouve des résidus de ces solvants (0,2 à 2 % en poids de la fibre) dans les eaux usées issues du pré-traitement.
Fibres de polypropylène
Le polymère isotactique est utilisé pour la production de la fibre. A cause de son atome de carbone tertiaire, le polypropylène est très sensible aux fortes températures et à l’oxydation.
Les phénols alkylés ou p-xylols, conjointement aux sulfures ou thio-dérivés (le thioproprionate de dilauryle ou de distéaryle) sont utilisés en tant que stabilisateurs. Les substances avec des groupes benzotriazoles, les complexes de nickel, les dérivés anthraquinoniques et les diamines à encombrement stérique sont utilisés en tant qu’absorbeurs d’UV. Ces substances de faible poids moléculaire restent dans les fibres de polypropylène et sont considérées comme pouvant générer des émissions.
Elasthanne
Les fibres d’élasthanne sont fabriquées à partir d’un élastomère contenant au moins 85 % de polyuréthanne (PU). Pour la production de la fibre (filage à sec), le polymère est dissout dans de la diméthylacétamide. Des résidus de ce solvant demeurent dans la fibre (<1 % en poids de la fibre) et se retrouvent dans les eaux usées issues du pré-traitement.
Afin de réduire les caractéristiques hautement adhésives et pour garantir des propriétés de glissement suffisantes pendant le procédé, des agents de préparation sont appliqués sur la fibre (complément d’environ 6 à 7 %). Ces produits auxiliaires contiennent 95 % d’huiles silicones et 5 % de tensio-actifs. Le pourcentage élevé d’huiles silicones posera des problèmes environnementaux pendant le pré-traitement de la matière textile lorsque ces substances doivent être éliminées.
Viscose
La cellulose constitue la matière de départ. Elle est extraite du bois de conifères et livrée pour la fabrication de la fibre sous forme de feuilles d’une épaisseur d’environ 1 cm. Le bois contient approximativement 40 à 50 % de cellulose utilisable pour la réalisation de la viscose. Tout d’abord, on laisse la cellulose gonfler dans une solution de NaOH. Les flocons blancs ainsi obtenus sont ensuite traités au bisulfure de carbone jusqu’à formation de xanthogénate de cellulose sodique. Le xanthogénate est soluble dans l’hydroxyde de sodium dilué et la solution formée (la pâte de fibres) est d’ores et déjà appelée viscose. La pâte de fibres doit alors être filée. Le filage consiste à coaguler la solution de xanthogénate en sortie de filière dans un bain acide contenant de l’acide sulfurique, du sulfate de sodium et du sulfate de zinc.
Cupro
La cellulose (pâte de bois) peut également être dissoute dans une solution aqueuse de sulfate d’ammonium et de sulfate de cuivre. Les fibres cupro sont obtenues par filage au mouillé.
Fibres d’acétate
La molécule de cellulose contient 3 groupes alcool. Si 2 à 2,5 de ces 3 groupes sont estérifiés par de l’acide acétique, le polymère est appelé diacétate. Si l’ensemble des trois groupes est estérifié, le polymère obtenu est appelé triacétate. Les fibres d’acétate contiennent moins de 92 % d’acétate de cellulose, mais au moins 74 % des groupes hydroxyles doivent être acétylés.
Laine
La laine est un poil animal provenant du mouton. La tonte s’effectue normalement une ou parfois deux fois par an. La qualité et la quantité de la laine varient fortement en fonction de la race du mouton et de son environnement. La laine fait partie d’un groupe de protéines connues sous la désignation de kératine, que l’on trouve également dans les cornes, les ongles, etc.
En plus des fibres de laine, la laine brute contient :
Le pourcentage des composants évoqués ci-dessus est susceptible de varier grandement en fonction de l’origine de la laine. Par exemple, la laine fine mérinos, principalement utilisée dans l’habillement, contient généralement 13 % de graisse de laine, tandis que les laines plus grossières du type de celles employées pour les tapis contiennent en moyenne environ 5 % de graisse.
La teneur en fibres propres de la laine brute est habituellement de l’ordre de 60 à 80 %, mais peut varier de 40 à 90 %.
La graisse de laine est insoluble dans l’eau, mais soluble dans des solvants apolaires, tels que le dichlorométhane ou l’hexane. La graisse de laine raffinée constitue un sous-produit de valeur.
Le suint est une matière soluble dans l’eau provenant de la sécrétion des glandes sudoripares de la peau. Le suint est soluble dans des solvants polaires, tels que l’eau et l’alcool.
La salissure peut comprendre une variété de matières, à savoir des impuretés minérales, du sable, de l’argile, de la poussière et des matières organiques.
Les ectoparasiticides ont d’importantes incidences sur les rejets d’effluents provenant du lavage de la laine brute et sur l’élimination des boues générées par le traitement des effluents.
Parmi les produits chimiques identifiés dans la laine brute se trouvent :
Les insecticides organochlorés sont dangereux en raison de leur persistance et de leur bioaccumulabilité. Ils sont alors susceptibles d’avoir des effets à long terme (à la fois en termes de distance de la source et de temps après pulvérisation). Le γ-Hexachlorocyclohexane (également appelé lindane) est le plus toxique (et également le plus actif en tant que pesticide) parmi les isomères hexachlorocyclohexanes (les α-HCH et β-HCH). Le produit technique brut contient du α-HCH et du β-HCH, l’isomère β étant le plus persistant. Les composés lindane et DDT sont des substances bien étudiées avec une capacité de perturbation endocrinienne démontrée.
Les pesticides pyréthroïdes synthétiques présentent une toxicité aquatique élevée (la concentration sans effet annoncée pour la cyperméthrine est estimée à 0,0001 μg/l, la valeur correspondante pour les insecticides organophosphorés, le diazinon et le propethamphos, étant de 0,01 μg/l – standards britanniques de qualité en matière d’environnement, exprimés en tant que moyenne annuelle). Les insecticides organophosphates présentent une toxicité aquatique moindre que les insecticides pyréthroïdes synthétiques et sont moins persistants que les insecticides organochlorés. Toutefois, ils ont une toxicité élevée pour l’homme par conséquent, des problèmes peuvent survenir par exemple pour des opérateurs de teinture en présence d’organophosphatés volatils à la vapeur.
Tous les principaux pays producteurs ont interdit l’utilisation de pesticides organochlorés pour les soins des moutons, mais il existe des preuves selon lesquelles la laine en provenance d’anciens états de l’Union Soviétique et d’Amérique du Sud contient du lindane à des concentrations détectables. Ceci semblerait indiquer soit que leurs pâturages sont fortement contaminés, soit que ce composé continue à être utilisé occasionnellement pour le traitement des moutons contre les ectoparasites.
La laine en provenance de la majorité des nations productrices contient des traces de médicaments utilisés légalement pour le traitement des moutons contre les infestations par les poux, les tiques et les acariens. Ces substances peuvent être des insecticides organophosphatés, généralement du diazinon, du propetamphos et du trans-chlorfenvinphos, des insecticides pyréthroïdes synthétiques, habituellement de la cyperméthrine, et des régulateurs de croissance d’insectes tels que le cyromazine. L’incidence de ces substances sur la laine est variable et dépend du mode d’utilisation légale autorisée dans chaque pays.
Les fabricants peuvent utiliser une base de données, qui contient en termes de quantité l’information sur les teneurs de la laine en insecticides organochlorés, organophosphorés et pyrethroides synthétiques en provenance des principaux pays producteurs. L’ENco tient à jour une base de données de ce type. Les fabricants utilisent ces données pour éviter de transformer de la laine d’origine suspecte. Le système profite immédiatement aux fabricants qui achètent et transforment de la laine en provenance de sources connues. Il est possible que les façonniers de fibres en bourre ou de fils ignorent l’origine des fibres qu’ils transforment. Il leur est alors plus difficile de contrôler les matières premières entrantes en utilisant cette approche.
De plus amples informations sur les ectoparasiticides sont fournies dans la section 2.3.1, qui examine le procédé de lavage de la laine.
Soie
La soie ne représente que 0,2 % de la production totale de fibres. Pourtant, cette fibre est très importante pour les articles de « niche », tels que les chemisiers, les vestes et écharpes pour dames.
La soie provient du ver à soie, qui file un cocon autour de lui-même. Il s’agit d’une fibre protéinique comme la laine et constitue le seul filament naturel utilisé avec succès dans l’industrie textile (la longueur du fil varie de 700 à 1 500 m).
La fibre de soie est constituée par des filaments de fibroïne enrobés de séricine (gomme de soie), qui doit être enlevée pendant le pré-traitement.
Coton et lin
La fibre de coton est principalement constituée de cellulose et de quelques autres composants présentés dans le tableau ci-dessous.
Composition chimique de la fibre de coton
Dans le cadre de la production du coton, il est possible d’utiliser des produits chimiques tels que des pesticides, des herbicides et des défoliants, et des traces de ces produits peuvent subsister dans les fibres du coton brut qui arrive à l’usine textile. Toutefois, cela n’est pas une préoccupation pour l’industrie textile (le problème se situe plutôt auprès des producteurs). En fait, des tests menés entre 1991 et 1993 sur des échantillons de coton provenant du monde entier, ont révélé des teneurs en pesticides inférieures aux valeurs limites pour les denrées
D’autres sources font état, il y a quelques années, de balles de coton contaminées par le pentachlorophénol, qui était non seulement utilisé en tant que défoliant, mais également en tant que fongicide appliqué sur les balles de coton pendant le transport.
Le lin est une fibre libérienne. De nombreux facteurs économiques ont contribué au fait que cette fibre a perdu beaucoup de son importance passée. Toutefois, le lin reste une fibre noble avec une large gamme d’applications.
Source BREF Textile du http://www.ineris.fr